Veiller sur elle de Jean-Baptiste Andrea – Résumé
Veiller sur elle de Jean-Baptiste Andrea est Prix Goncourt 2023.
L’histoire commence à Pietra d’Alba, un village perdu d’Italie où notre narrateur évoque les événements tragiques et les luttes intestines qui ont déchiré sa communauté. Les premières tensions émergent avec l’arrivée des squadristi, des milices fascistes à la solde de Stefano Orsini, répandant la terreur parmi les villageois et éliminant toute velléité de révolte. L’injustice frappe en plein cœur la population, surtout les plus pauvres, précipitant une série de drames que l’on essaie de camoufler sous le couvert des discours officiels.
Le protagoniste, sculpteur autodidacte, décrit sa passion pour la sculpture, une vocation transmise par son père. Dans l’atelier, il se consacre à des œuvres monumentales comme “L’Homme nouveau”, nourri par la rigueur et la recherche de la perfection, tout en vivant sous l’influence des Orsini, une puissante famille du village. Le contexte politique étouffe peu à peu ses ambitions artistiques, et il doit se plier aux commandes des plus influents, notamment celle d’une statue de Saint Pierre destinée à un haut dignitaire ecclésiastique, Mgr Pacelli, futur Pape.
Une autre dimension de son histoire se déroule à Rome, où il découvre une vie plus intense, pleine de contradictions. Bien qu’il aspire à la liberté, son rôle d’artiste reste contrôlé par le régime en place. Il s’installe dans un modeste appartement juste au-dessus de son atelier, dont la proximité au Vatican lui permet de travailler sur d’importantes commandes religieuses. Il apprend à jongler entre des restaurations de bâtiments historiques et ses propres créations, tout en étant constamment tiraillé par ses doutes sur le sens de son art et les compromis qu’il doit faire.
Une rencontre marquante est celle de Viola, une jeune fille appartenant aux Orsini, avec qui il développe une relation ambiguë, entre admiration et complicite. Viola est un esprit libre, révolté contre l’oppression et les conventions, qui influence profondément son approche de la vie et de l’art. Leur amitié prend la forme de rendez-vous secrets, souvent à travers des signaux lumineux depuis la villa Orsini, ou des discussions à la nuit tombée. Viola le pousse à questionner ses choix, notamment son allégeance au pouvoir en place.
Le roman entrelace les tensions politiques avec les défis personnels et familiaux. Loin de Rome, dans le village natal, la mère du protagoniste est malade, et les relations avec elle sont complexes. Les souvenirs de la Grande Guerre restent vivaces, pesant sur la dynamique familiale. La mère, une figure à la fois distante et tendre, incarne un lien fragile avec le passé, et la maladie n’a fait qu’approfondir le fossé entre eux.
L’histoire s’intensifie lorsque Viola organise une évasion audacieuse lors d’une fête, en utilisant un parachute artisanal pour s’échapper de la maison familiale, devant une foule surprise. Mais son envol prend une tournure tragique lorsqu’une rafale de vent déstabilise le parachute, entraînant une chute fatale dans la forêt. Ce drame marque un tournant décisif dans la vie du sculpteur : la perte de Viola le plonge dans une solitude et un désespoir profond, décuplant son sentiment d’impuissance face à l’injustice.
Alors qu’il essaie de continuer sa carrière à Rome, il est hanté par la mémoire de Viola et l’oppression des fascistes. Une partie de lui souhaite rester pour combattre, mais il se rend compte qu’il est impuissant. Le climat politique devient insupportable, et il finit par s’installer à Florence, loin du regard des Orsini et de l’étendue de leurs pouvoirs. Ses années à Florence sont celles des excès, d’une liberté débridée qui le conduit à la débauche. À ce moment, il perd le fil de son art, sombrant dans une vie où l’alcool, les femmes et les nuits sans fin deviennent ses seules occupations.
Il y a un retour à la sculpture quand il décide de créer une statue d’un ours, une allégorie symbolique de sa propre lutte pour retrouver un sens à sa vie et pour honorer la mémoire de Viola. L’ours, à moitié sculpté dans un marbre d’une pureté exceptionnelle, est à la fois brut et délicat, reflet de sa propre évolution : une métamorphose inachevée. La sculpture devient le point culminant de son travail artistique, marquant à la fois un hommage et un adieu à ce qu’il a aimé et perdu.
L’histoire se termine par un retour mélancolique à Pietra d’Alba, des années plus tard. Le sculpteur, épuisé par les épreuves, revient pour confronter ses souvenirs et son passé. Il retrouve une certaine paix intérieure en revisitant les lieux de son enfance, où les traces de Viola et de ses rêves inachevés résonnent toujours. Ses derniers instants sont empreints de la volonté de se fondre dans l’oubli, demandant à être enterré sous une pierre lisse, sans inscription, comme pour effacer toute trace de sa présence et laisser son œuvre parler à sa place.
Ce livre parle de résistance face à la tyrannie et de la liberté individuelle. Il nous entraîne dans les méandres de la vie d’un homme qui, bien qu’opprimé et brisé par le régime, n’a jamais cessé de chercher la beauté, de façonner son destin malgré les obstacles.
3 points clés de « Veiller sur elle » à connaître pour faire semblant de l’avoir lu alors qu’on ne l’a pas lu
- La relation avec Viola et son envol tragique : L’un des moments les plus marquants du livre est la tentative de fuite de Viola avec un parachute artisanal, qui se solde par une chute fatale. Cette scène est essentielle car elle catalyse le désespoir du protagoniste et symbolise l’échec de l’émancipation dans un contexte oppressif.
- La commande de la statue de Saint Pierre pour Mgr Pacelli : Le protagoniste reçoit la commande de créer une statue de Saint Pierre pour Mgr Pacelli, futur Pape, ce qui illustre les pressions politiques et artistiques auxquelles il est soumis. Cela montre la difficulté pour l’artiste de concilier son intégrité personnelle avec les exigences du régime en place.
- La sculpture de l’ours comme symbole de résilience : Après des années de débauche et de désillusion, le protagoniste revient à l’art avec la création d’une statue d’ours. Cette sculpture inachevée représente son parcours intérieur et sa lutte pour retrouver un sens à sa vie après la mort de Viola, marquant ainsi un point culminant de son évolution artistique et personnelle.
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